Bertrand Chareyron, la passion de l’innovation durable

Depuis 2007, Tech & Bio réunit tous les deux ans des agriculteurs de tous horizons pour découvrir les nouvelles techniques de production biologique et alternative. A la tête de ce Salon, Bertrand Chareyron: un ingénieur devenu agriculteur lui-même, éternel optimiste et pragmatique acharné, pour qui la bio montre à tous le chemin de l’innovation durable.  

C’est l’histoire d’un fils d’agriculteur de la Drôme qui n’aime travailler ni en silos ni en solo. Un « technicien », comme il aime se définir, ingénieur agronome passé par l’Isara, à Lyon, où il s’est passionné très tôt pour les questions de fertilité des sols et comme une évidence sur l’agriculture biologique.

Sa première aventure professionnelle l’amène à la Chambre Régionale d’Agriculture de Franche-Comté. Sa mission principale : aider les éleveurs de bovins bio à accroître leur autonomie alimentaire. « Nous étions en 1999, c’était le tout début de la bio, se souvient Bertrand Chareyron. Nous n’étions encore qu’une poignée de conseillers en France. Et nous nous retrouvions souvent à Paris, à l’APCA, à l’ITAB ou à la FNAB pour partager nos références, nos différents essais sur les relations sols/plantes/animal et pour ma part sur le lupin, les pois fouragers, les féveroles… »

En 2003, retrouvant sa Drôme natale, il devient référent Grandes cultures bio en Rhône-Alpes, où il s’emploie à faire circuler les bonnes pratiques et les connaissances techniques. C’est dans cet esprit qu’il organise en 2004 une Journée Grandes cultures bio. Le succès de ce type de journées techniques reproduites par ses collègues sur différentes filières donne à la Chambre d’agriculture, appuyée par le Département de la Drôme et l’APCA, l’idée d’organiser un salon : ainsi est né ce qui allait devenir Tech&Bio.

le bio, ou la richesse de l'innovation sous contrainte

La première édition du salon se tient en 2007. Sous la direction d’Olivier Durant, Bertrand Chareyron y est notamment en charge des cultures de démonstration. « Du pratico-pratique ! » insiste-t-il. La programmation du salon n’en porte pas moins la marque de son engagement de toujours, et de son ouverture vers toutes les agricultures. « L’échange de pratiques entre agriculteurs bio était évidemment au cœur du projet, raconte-t-il. Mais il nous paraissait essentiel de nous adresser aussi aux agriculteurs conventionnels. » Parce que beaucoup d’entre eux ont le souci d’utiliser des techniques alternatives aux produits chimiques. Et parce qu’avec les contraintes qu’elle s’impose, l’agriculture biologique stimule la créativité : un terreau parfait pour des innovations qui peuvent bénéficier à tous !

Un exemple ? Les bineuses, pour éviter le recours aux désherbants, dont les performances s’améliorent d’année en année – et que l’on retrouve désormais chez tous les concessionnaires. « Tech&Bio est aussi l’endroit où les agriculteurs peuvent faire entendre leurs messages aux industriels, et faire comprendre leurs besoins ! » Besoins qu’il connaît bien pour côtoyer les exploitants bio en tant de conseiller… mais aussi, désormais, en tant qu’agriculteur lui-même.

Un technicien devenu agriculteur...et commissaire

En 2018, en effet, Bertrand Chareyron a repris la ferme familiale, qu’il a convertie en bio pour produire, sur une vingtaine d’hectares, luzerne, soja (pour l’alimentation humaine), maïs, blé et seigle, ainsi que des semences de tournesol.

Trois ans plus tard, prenant la suite d’Olivier Durant, il devient commissaire général de Tech&Bio, avec la complicité notamment de Mélanie Béranger (animatrice du réseau bio des chambres d’agriculture) pour le contenu technique et la programmation des rencontres. « L’esprit est toujours le même : nous cherchons les expertises les plus pointues, pour que tous les agriculteurs puissent trouver le meilleur des techniques bio, des techniques alternatives et réponse à leurs questions. »

Réunir une telle diversité d’experts (issus du réseau des chambres d’agriculture mais aussi des instituts techniques, de l’INRAE, des GAB, de la Coopération agricole ou encore des CUMA…) est pour lui l’une des plus grandes réussites de Tech&Bio. L’autre, c’est d’avoir su maintenir cette ouverture aux agriculteurs conventionnels, pour faire de Tech&Bio « le salon de tous les agriculteurs en quête de solutions et de pratiques agricoles durables ». Avec un credo : les conventionnels d’aujourd’hui sont les bios de demain !

Sobriété et adaptation, deux thèmes phares en 2023

21 000 visiteurs et 375 exposants sont attendus pour l’édition 2023, qui accueillera 13 délégations internationales et proposera une centaine de démonstrations et ateliers en plein champ, sur l’exploitation du Lycée Agricole du Valentin, à Bourg-lès-Valence. « On y mettra l’accent sur deux grandes thématiques : la sobriété énergétique et l’adaptation au changement climatique ». Il y sera beaucoup question de pilotage de la ressource, d’irrigation et de techniques diverses pour diminuer les besoins en eau. D’énergies renouvelables aussi – de la méthanisation à l’agri-voltaïque. Avec comme toujours une approche par l’exemple, et des échanges constructifs sur les pratiques efficaces et durables.

Et qu’on ne parle pas à Bertrand Chareyron de « crise de la bio » ! « Eternel optimiste » mais aussi résolument pragmatique, il constate bien une crise du pouvoir d’achat dans une période chahutée, mais reste « convaincu que la bio a un grand avenir devant elle ». Et il appelle tous les agriculteurs à optimiser leurs pratiques pour convaincre de nouveau les consommateurs en parlant à leur porte-monnaie autant qu’à leur conscience écologique. Comment faire ? S’inspirer des pratiques les plus efficaces pour baisser ses coûts de production, mais aussi pour valoriser au mieux les productions – Un mot de conclusion ? « Venez donc parler de tout ça avec nous à Tech&Bio 2023 », lance Bertrand Chareyron dans un grand sourire.